– Activisme digital, expériences croisées entre militant·e·s européen·ne·s et militantes féministes d’Afrique de l’Ouest

– Activisme digital, expériences croisées entre militant·e·s européen·ne·s et militantes féministes d’Afrique de l’Ouest

Grâce à une collaboration avec les membres du groupe #Jeresiste, Equipop et les membres du Réseau des Jeunes Féministes d’Afrique de l’Ouest ont eu l’opportunité de participer à une conférence en ligne le 10 juin 2020 sur l’activisme digital.

En tant que militantes féministes, les membres du Réseau des Jeunes Féministes d’Afrique de l’Ouest et d’autres militant·e·s partenaires d’Equipop agissent régulièrement sur les réseaux sociaux. Cet activisme digital peut les amener à être confronté·e·s à des violences ou des difficultés en ligne. Celles-ci prennent différentes formes : injures, intimidation, cyber harcèlement, etc. Pour surmonter ces obstacles, plusieurs stratégies sont possibles. L’une d’entres elles est de pouvoir échanger avec d’autres militant·e·s sur leurs vécus, leurs combats, leurs pratiques, dans une dynamique de soutien mutuel et d’échange d’expériences.

Dans ce contexte, les témoignages des panélistes et les échanges avec les spectateurs·trices ont permis de mener une réflexion sur le militantisme en ligne, et surtout sur les manières de se protéger et de protéger ses proches. 

Intervenir en ligne, la continuité de l’activisme sur le terrain

Petit à petit, l’utilisation d’internet dans les actions de communication des activistes est devenue indispensable en complément des activités classiques. Intervenir sur les réseaux sociaux est une manière pour les défenseurs·euses des droits humains de continuer et d’amplifier leurs actions sur le terrain, comme le fait Hadja Idrissa Bah, en mobilisant et en alertant sur les mariages d’enfants. 

“Certaines personnes sont pour (ce qu’on fait), d’autres sont contre, mais on continue de relayer les informations sur les activités du Club des Jeunes filles leaders de Guinée”

Hadja Idrissa Bah

Facebook, Twitter ou encore Whatsapp peuvent également être utilisés pour diffuser des messages et organiser une prise de conscience ou une mobilisation, au niveau citoyen et politique, sur des sujets de société. Dieynaba N’diom donne l’exemple du travail sur le projet de loi mauritanienne à propos des violences faites aux femmes : dans ce cas précis, les militantes comme elle utilisent les réseaux pour informer et sensibiliser sur cette loi, et contrer les fausses informations diffusées par le camp adverse. Cela permet également aux militantes féministes de rester en lien avec leurs homologues de la région, et de s’inspirer mutuellement. Ce fut le cas, par exemple,  lors du twittathon organisé par le Réseau des Jeunes Féministes d’Afrique de l’Ouest sur son compte twitter, pour mettre en avant les paroles des féministes ouest-africaines sur les conséquences du Covid-19. 

“On peut utiliser ces canaux pour faire passer des messages, les réseaux sociaux font partie des canaux les plus puissants pour la communication.”

Dieynaba N’diom.

Doxing, intimidations, menaces… 

Malgré les possibilités offertes par les réseaux sociaux pour renforcer le travail des activistes, ils n’en restent pas moins un terrain hostile pour les défenseurs·euses des droits humains, qui se retrouvent confronté·e·s au regard et aux jugements de la société à laquelle ils appartiennent. 

“Sur les réseaux, on est confronté·e·s aux barbelés du patriarcat, à l’obscurantisme, à l’ignorance.”

Dieynaba N’Diom.

 

Les militantes féministes sont particulièrement exposées et se retrouvent confrontées à des attaques personnelles et des menaces à leur intégrité, comme en témoigne Hadja Idrissa Bah. Certaines d’elles·eux peuvent se retrouver face à un véritable harcèlement et recevoir des milliers de messages insultants ou menaçants, parfois mettant en cause leurs proches. 

Se protéger contre ces pratiques

“Les gens vont utiliser ce qu’il y a sur votre page facebook pour vous attaquer, avec des insultes ou des menaces. “

Dieynaba N’diom

Lorsqu’elles·ils ont été confronté·e·s à des menaces ou du harcèlement, les panélistes ont petit à petit mis en place plusieurs stratégies pour se protéger :

  • Protéger sa vie privée sur les réseaux, en contrôlant au maximum les informations personnelles (statut familial, coordonnées, etc.) qui apparaissent sur son compte.
  • En cas de menace, prendre des captures d’écran, ou demander à des allié·e·s de le faire si c’est trop dur pour la personne attaquée. Ces images pourront ensuite servir pour une éventuelle action en justice.
  • Essayer de vérifier et sourcer en amont les informations que l’on publie.
  • Essayer de distinguer les faux comptes des vrais, et bloquer les faux comptes.
  • Parler à des personnes ressources de ce que l’on vit, des difficultés qu’on rencontre, ne pas rester seul·e face à la menace, et ne pas hésiter à demander de l’aide à d’autres militant·e·s, à des proches ou à des associations.
  • Se constituer en réseau pour échanger et se soutenir mutuellement avec les autres activistes. 
  • Quand d’autres activistes sont attaqué·e·s, manifester son soutien.

“J’ai eu la chance d’avoir le soutien des jeunes féministes, je les remercie, des filles de mon association. (…) J’ai eu le soutien de mes amies, de mes soeurs féministes ouest-africaines francophone. C’est réconfortant de savoir qu’on est soutenue quand on est dans une situation difficile.”

Hadja Idrissa Bah.

Les témoignages des panélistes, et l’expérience du groupe de militant·e·s #Jeresiste montrent l’importance du soutien des pairs, et donnent quelques pistes pour que chacun·e, à son échelle, puisse lutter contre le cyberharcèlement ou les chaînes de commentaires haineux en ligne. On peut par exemple exprimer, en public ou en privé, son soutien à une personne victime de harcèlement, liker les commentaires positifs, éviter de répondre ou d’interagir directement en réponse aux commentaires haineux pour ne pas leur donner plus de visibilité. Et si on s’en sent capable, commenter de manière pacifique les articles ou les posts sur les réseaux sociaux en rappelant les grands principes des droits humains, et en évitant toute attaque ad-hominem.

Pour aller plus loin :