– Résister collectivement face à l’extrême droite

– Résister collectivement face à l’extrême droite

Face aux scores historiques de l’extrême droite aux élections européennes et après l’annonce irresponsable d’Emmanuel Macron de dissoudre l’Assemblée nationale, il est urgent de se mobiliser à tous les niveaux pour défendre les droits des femmes, l’égalité de genre et les valeurs démocratiques.

Les élections européennes ont été marquées par le score sans précédent de l’extrême droite, qui a rassemblé 38% des suffrages exprimés en France. De tous les partis d’Europe, le RN est celui qui envoie le plus d’eurodéputé·e·s au Parlement européen. Moins d’une heure après les premiers résultats, le président Emmanuel Macron a annoncé la dissolution de l’Assemblée nationale et la tenue d’élections législatives anticipées dans un délai extrêmement court. 

Le risque que l’extrême droite accède au pouvoir est réel et les conséquences seraient immenses, en particulier pour les femmes, les personnes migrantes, les personnes LGBTQIA+. Plus largement, ce sont la démocratie, les droits sociaux et les libertés individuelles qui seraient mises à mal. L’observation de ce qui se passe dans les pays où les forces d’extrême droite gouvernent est instructive en la matière et ce, quelques soient les continents.

En Italie, ces forces d’extrême droite menacent le pluralisme des médias et invitent des opposants à l’avortement dans les centres de planning familial. Les parlementaires européens de la Lega, de Fratelli d’Italia et une partie de ceux de Forza Italia ont par ailleurs refusé de ratifier la convention d’Istanbul. En Argentine, le président populiste Javier Milei a supprimé le ministère de l’Égalité femmes-hommes et l’Institut National contre les Discriminations (INADI). Il nie les évidences scientifiques concernant le changement climatique et souhaite abroger le droit à l’avortement. Il a diminué les financements de la recherche et ne cesse de disqualifier l’université publique. Aux Etats-Unis, la mandature de Donald Trump a mis fin au droit à l’avortement et ruiné des décennies d’efforts dans les instances multilatérales pour faire avancer les droits des femmes et la lutte contre le changement climatique. Un bilan catastrophique qui ne semble même pas avoir disqualifié Donald Trump et la droite ultraconservatrice américaine, puisqu’il pourrait remporter l’élection de novembre – signe qu’avec l’extrême droite la preuve par l’exemple ne fonctionne pas. 

Une campagne marquée par l’absence des droits des femmes et la banalisation de l’extrême droite

C’est précisément pour pointer ces risques qu’Equipop a publié mi-mai un rapport au titre sans équivoque “Quand l’extrême droite avance, les droits des femmes reculent”, où nous alertions sur les dangers liés à la montée de l’extrême droite. Les semaines qui ont suivi ont malheureusement donné raison aux alertes lancées par les féministes. Aucun média grand public n’a pris la mesure des enjeux de ces élections pour les droits des femmes et l’égalité de genre. Sur les plateaux télévisés, Jordan Bardella et Marion Maréchal ont déversé des torrents de haine sexistes et racistes, avec très peu voire aucun répondant de la part des médias ou des autres responsables politiques en présence. Au contraire, Jordan Bardella a bénéficié d’une surexposition médiatique que rien ne justifiait, là où d’autres têtes de liste, porteuses de projets féministes et écologistes, ont été marginalisées.

Résister collectivement

La décision d’E. Macron rend une accession du RN probable pour la première fois de l’histoire de la Ve République. Elle n’est toutefois pas une fatalité. Les mobilisations féministes, solidaires et transnationales ne faiblissent pas, bien au contraire, comme en témoigne l’initiative “Ma voix, mon choix”.

 

A court et long terme, une mobilisation générale, à tous les niveaux, est maintenant nécessaire.

Aux médias, il revient la responsabilité d’arrêter de banaliser l’extrême droite, de la présenter pour ce qu’elle est, et d’inviter des activistes et chercheuses féministes qui présenteront des points de vue documentés. Comment peut-on continuer à laisser le RN dire que les violences sexuelles sont majoritairement le fait d’immigrés ?

Aux partis politiques hors extrême droite et notamment à ceux qui affichent la volonté de défendre les droits des femmes et l’égalité de genre, il revient la responsabilité de faire perdre l’extrême droite partout et d’éviter les attaques qui affaiblissent les forces progressistes pendant que l’extrême droite compte les points. Les dynamiques d’alliances doivent être dirigées vers cet objectif. Il est également de leur responsabilité de mettre en lumière les positions intenables du RN sur les droits des femmes et l’égalité de genre : il n’est pas acceptable que la question des droits des femmes soit amenée dans le débat par l’extrême droite, et donc à des fins racistes, comme cela a été le cas la plupart du temps dans la campagne des Européennes. 

Aux citoyennes et citoyens, enfin, il revient la responsabilité de se rendre aux urnes les 30 juin et 7 juillet. 

 

Dans les jours qui viennent, Equipop va continuer ses actions en partageant ses analyses, en interpellant les médias et les responsables politiques, et en s’associant aux nombreuses initiatives associatives. Depuis plusieurs jours, nous nous mobilisons avec la coalition féministe #AlertesFéministes. Le 23 juin, nous sonnerons des alertes féministes partout en France pour appeler à faire barrage à l’extrême droite et à voter massivement pour un avenir qui permette l’émancipation et la liberté de tou·te·s.

En Pologne, ce sont les femmes et les jeunes qui ont écarté l’extrême droite du pouvoir, après huit ans de politiques machistes et anti-démocratiques. En France aussi, nous résisterons !

* Crédit illustration : Jessica Whitney Crowe x Fine Acts (modification des couleurs, du texte et de l’organisation du visuel)