– L’empouvoirement en action dans le projet SANSAS

– L’empouvoirement en action dans le projet SANSAS

L’expérience du projet SANSAS illustre la puissance de l’entraide et de la cohésion dans un groupe. Des confidences des jeunes leaders impliqué.e.s émanent une dynamique collective forte, portée par un élan de solidarité mutuelle. « Pour moi, le projet SANSAS c’est la cohésion entre les jeunes, une solidarité qui s’est installée », exprime l’une d’entre elleux.

 

Pour rappel, le projet SANSAS vise à améliorer l’accès à des services de santé reproductive adaptés aux adolescent·e·s et jeunes du Sénégal.

Cette énergie a constitué un terrain propice à l’épanouissement et à l’autonomisation des jeunes. Au cœur de cette aventure humaine riche en partages, un véritable processus d’empouvoirement s’est déployé, permettant à chacun.e de développer ses capacités individuelles, tout en faisant émerger de nouvelles dynamiques collectives inspirantes.

 

La force du collectif et des liens créés a ainsi agi comme un levier essentiel pour que ces jeunes puissent pleinement se révéler, prendre confiance en elleux et devenir acteur.ice.s de changement au sein de leurs communautés. Une belle démonstration qui prouve que la convergence des forces vives, dans un élan solidaire et bienveillant, donne à voir de grandes avancées !

 

“Quand tu organises des activités et que les gens viennent en masse, il y a quelque chose que les autres voient en toi” 

 

Le développement des compétences en communication constitue l’un des principaux moteurs des changements observés chez les jeunes leaders. Ces nouveaux acquis leur permettant de libérer leur parole, de briser les barrières de l’apathie et d’accompagner leurs pair.e.s à échanger sur leur propre santé. Oser aborder des sujets tabous, animer des causeries, interpeller les autorités politiques avec détermination sont autant de compétences acquises au cœur du projet. Les jeunes leaders sont devenu.e.s des piliers d’informations de qualité, suscitant l’admiration de leur communauté et de leurs pair.e.s.

 

La confiance en soi est devenue l’un de leurs super-pouvoirs, conférant à ces jeunes plus de responsabilités et une forte capacité à mobiliser, à être écouté.e et entendu.e, y compris par leurs parents et les autorités. “Ce qu’on dit, ça compte”, rappelle une jeune leader de Mbour. Cette situation vient redéfinir les rapports de pouvoirs traditionnels, invitant à une plus grande prise en compte de la parole et des savoirs des jeunes et donc des relations plus égalitaires. Au-delà de la prise de parole, le gain en responsabilités ainsi que les compensations versées aux jeunes (remboursement des frais de transport et collations) amènent à des changements de position au sein de leur famille.

 

“Avec le projet et la rémunération, pour mes parents je suis devenue responsable de moi, je peux même m’acheter des fournitures” (une jeune leader de Sédhiou).

 

Des changements se sont également opérés sur les rapports femmes-hommes grâce à la dynamique de groupe et la mise en place d’activités collectives. Cette approche a instauré une solidarité et un respect mutuel entre les jeunes. Si, au démarrage du projet, filles et garçons hésitaient à interagir, elles et ils se fréquentent désormais même en dehors des activités collectives. Par ailleurs, certaines jeunes filles ont gagné en assurance et en conscience de leurs droits, tandis que certains garçons ont développé connaissances et empathie sur des sujets comme les violences basées sur le genre, la santé et la dignité menstruelle ou encore les mutilations sexuelles féminines.

 

Enfin, l’un des résultats les plus marquants vient de l’autonomisation des jeunes leaders vis-à-vis des équipes du projet Sansas dans la réalisation d’activités, à leur initiative et non prévues initialement par le projet. “Les jeunes leaders sont dans des conditions pour que ce soit à eux et elles d’initier des choses, on les a poussés à identifier les problèmes et à prendre des décisions” (animateur responsable du RAES). C’est le cas par exemple d’un camp d’été qui a été organisé par des jeunes leaders de Sédhiou (sur le modèle du camp d’été de Mboro), rassemblant 150 personnes sur 3 jours début 2024, illustrant leur capacité à mettre en œuvre leurs compétences, même avec des ressources limitées.

De l’empouvoirement individuel au collectif : un processus en mouvement

Le processus d’empouvoirement a été marqué par une approche théorique et pratique. Si les formations ont été des catalyseurs de transformation, c’est principalement dans la mise en pratique immédiate que les jeunes explorent leur capacité d’agir. “Toutes les activités sont données par les jeunes, toutes les formations, ce sont les jeunes qui en bénéficient, ils reçoivent directement les convocations, ce projet, c’est leur projet” explique le responsable du CCA (Centre Conseil pour Adolescent.e.s) de Sédhiou.

 

Le camp d’été de Mboro a ainsi été un moment charnière, conférant aux jeunes des nouveaux super-pouvoirs: pouvoir d’action et de décision. Le camp d’été a aussi révélé l’importance d’être un collectif agissant et solidaire, ce qui s’est traduit par le fait d’initier de nombreuses activités par la suite : création de discussions au niveau des quartiers et écoles, développement du dialogue parents-ado, etc. Elles et ils ont puisé dans leur potentiel collectif, réalisant “qu’ensemble, on va plus loin”. Cet esprit de groupe et ces valeurs de sororité et adelphité renforcent la capacité des jeunes à porter des plaidoyers auprès des autorités locales et nationales : allant d’une plus grande connaissance de leurs droits, à l’exigence de l’exercice de leur mise en application.

 

Les alliances stratégiques avec les autorités et les prestataires de santé participent également de cette reconnaissance envers les jeunes et leur pouvoir d’action. Leurs voix sont désormais écoutées et respectées, témoignant d’un changement profond dans les rapports de force traditionnels.

 

Ensemble, les jeunes leaders ont créé un environnement propice à l’expérimentation et à la croissance de leur pouvoir d’agir. Cette union constitue une force, et un espace dans lequel l’autre est respecté et les oppositions considérées comme des possibilités d’échanger et d’avancer. La communauté de jeunes leaders apparaît comme un cadre d’expérimentation, de confiance et d’entraide. Il s’agit clairement d’un espace d’empouvoirement à soi et en soi, à travers l’exercice d’un pouvoir collectif favorisé par la création de binômes d’animation et de fréquents regroupements. Le tout renforcé par l’existence de lieux à disposition des jeunes “Une fois que tu as franchi cette porte, il n’y a plus de tabous, plus de complexes” (un jeune leader de Sédhiou).

Pour “aller plus haut”

L’empouvoirement est un processus en mouvement et pour “aller plus haut”, les jeunes ont entamé une réflexion sur les changements qu’elles et ils souhaiteraient renforcer d’ici la fin du projet, et dans l’optique d’une éventuelle phase 2. Cela passerait principalement par :

 

i) une diffusion plus fréquente par les pair.e.s pour les pair.e.s des connaissances et compétences acquises : création de nouveaux clubs, formation par les jeunes leaders elleux-mêmes d’autres jeunes, identification de nouveaux “jeunes leaders” y compris venant des marges (jeunes non alphabétisé.e.s, en situation de handicap, 10-14 ans, etc.) pour une meilleure prise en compte de leurs besoins et une plus grande inclusivité du projet.

 

ii) un travail de sensibilisation approfondie auprès des parents sur les droits et la santé sexuels et reproductifs des jeunes et une meilleure connaissance du cadre légal. Ce travail devrait s’accompagner de l’appui des leaders religieux notamment.

 

iii) la création d’espaces de dialogue entre jeunes et prestataires de santé pour renforcer la compréhension par les prestataires des besoins des jeunes; réduire l’appréhension des jeunes vis-à-vis des prestataires; faire des prestataires des allié.e.s pour porter le plaidoyer avec les jeunes. Cette démarche vient renforcer une dynamique en œuvre de démocratisation de la santé.

 

iv) l’identification de stratégies d’alliance avec les écoles pour mener à bien des activités de sensibilisation sur les DSSR dès le plus jeune âge et en partenariat avec le secteur de l’enseignement.

 

v) faciliter la réalisation d’initiatives spontanées des jeunes leaders par la mise à disposition de moyens : enveloppe financière souple disponible dans le projet, mise à disposition de locaux “points de rassemblement” conviviaux, appui logistique par l’équipe projet.

Ces propositions permettront sans aucun doute de renforcer durablement l’engagement des jeunes pour une meilleure santé.