Vers une construction plus féministe de la paix
“Empouvoirer et connecter les femmes et les jeunes pour impulser l’agenda Femmes, Paix et Sécurité en Afrique de l’ouest” – Dans un monde où croissent les crises diverses, les conflits et les menaces à la paix et à la sécurité des personnes en général et des filles et femmes en particulier, la Journée Internationale de la Paix nous offre l’occasion de rappeler l’inéluctabilité de la paix, pour réaliser les ODD à l’horizon 2030 dans un monde juste, équitable et durable.
Dans de nombreuses régions du monde, du fait de multiples crises sanitaires, environnementales et sécuritaires, les populations locales ont vu leurs droits et leurs conditions de vie fortement dégradés ces dernières années. Au Burkina, Niger et Tchad, la crise sécuritaire a exacerbé les inégalités de genre structurelles, la vulnérabilité et l’exposition aux violences sexistes et sexuelles des femmes et des jeunes, déjà présentes dans une société patriarcale fortement marquée.
L’agenda Femmes, paix et sécurité en Afrique de l’ouest
Les conséquences spécifiques des crises et des conflits sur les femmes, tout comme l’enjeu de leur participation active dans la prévention, la construction et le maintien de la paix ont été adressés par le Conseil de sécurité des Nations Unies en 2000, avec le vote de la résolution 1325, pierre angulaire de l’agenda “Femmes, Paix et Sécurité” (FPS).
Cet agenda qui contient neuf résolutions complémentaires (1820, 1888, 1889, 1960, 2106, 2122, 2242, 2467 et 2493) reconnait que:
« toutes les parties à un conflit armé doivent prendre des mesures particulières pour protéger les femmes et les filles contre les actes de violence sexiste, en particulier le viol et les autres formes de sévices sexuels, ainsi que contre toutes les autres formes de violence, respecter le caractère civil et humanitaire des installations de réfugiés et, tenir compte des besoins particuliers des femmes et des filles ; les Etats doivent mettre fin à l’impunité et poursuivre en justice les coupables de tels actes ». Par ailleurs, « les États doivent faire en sorte que les femmes soient davantage représentées à tous les niveaux des processus de prise de décisions et de suivi dans les institutions et mécanismes nationaux, régionaux et internationaux pour la prévention, la gestion et le règlement des conflits » ; « les Etats doivent intégrer, entre autres, la dimension genre dans toutes les politiques et programmes, y compris de DDR (désarmement, démobilisation et réintégration) ».
Rassemblées lors du Forum Génération Egalité (FGE) en 2021 (événement féministe mondial le plus important depuis Beijing 1995, les OSC et jeunes activistes ont contribué au lancement d’un « plan d’accélération mondiale » en matière d’égalité entre les femmes et les hommes incluant le « Compact on Women, Peace and Security and Humanitarian Action », mécanisme de coordination et de redevabilité autour de l’Agenda FPS et de l’aide humanitaire ciblée auprès des femmes et des filles.
Dans la même lignée que l’agenda FPS, l’agenda Jeunes, Paix et Sécurité (JPS) a été mis en place avec l’adoption des résolutions 2250 (2015), 2419 (2108) et 2535 (2020).
Aux niveaux régional, sous-régional et national, plusieurs instruments législatifs, politiques et institutionnels ont intégré les principes des agendas FPS et JPS. Que ce soit la CEDEAO qui a été le premier organe à adopter un plan d’action régional en Afrique et a mis en place le Réseau Paix et Sécurité pour les Femmes de l’Espace CEDEAO, les Nations Unies qui ont mis en place une stratégie intégrée pour le Sahel, UNOWAS et ses partenaires qui ont instauré un « Groupe de Travail sur les Femmes, les Jeunes, la Paix et la Sécurité en Afrique de l’Ouest et au Sahel » en 2009, ou encore le cadre de coordination et de suivi de la coopération régionale en matière de politiques de développement et de sécurité (G5 Sahel) créé par le Burkina, Mali, Mauritanie, Niger et Tchad en 2014.
Au niveau national, des plans d’actions nationaux (PAN1325) ont été adoptés, notamment par le Burkina Faso dès 2012, le Niger dès 2017 ou récemment le Tchad en janvier dernier.
Malgré tous ces progrès institutionnels, les voix des femmes et des jeunes demeurent inaudibles face au tapage du tout militaire et des rapports de force géo-politiques. Ces dernier.e.s restent sous représenté.e.s, en marge des instances de gestion de crise à tous les niveaux, et iels ont peine à accéder aux opportunités de financement et d’assistance technique pour répondre à leurs besoins spécifiques et mettre en œuvre leurs actions à fort potentiel de changement.
Le rôle Essentiel des Femmes et des jeunes dans la construction de la paix
Nous, Equipop, Gorée Institute, Femmes Actions et développement et Diakonia réaffirmons l’importance majeure de l’engagement des femmes africaines, notamment des plus jeunes dans la prévention des conflits, la médiation et la reconstruction post-conflit. La contribution de leurs initiatives en faveur de l’agenda Femmes, Paix et Sécurité en Afrique de l’ouest, en nexus avec l’agenda Jeunes, Paix et sécurité est cruciale, pour mettre un terme aux conflits persistants, prévenir de nouvelles violences et bâtir une région où chacun·e peut aspirer à vivre en paix et en sécurité.
En cette journée Internationale de la Paix, nous interpellons d’une part, les femmes et les jeunes afin qu’iels s’impliquent davantage dans la consolidation de la paix et de la sécurité ; et d’autre part, les partenaires au développement à tous les niveaux, afin qu’iels renforcent leurs dispositifs d’appui technique et financier multiformes, flexibles, participatifs et durables aux féministes et à leurs organisations.