Santé sexuelle et reproductive en Afrique de l’Ouest : une jeunesse impliquée

Comment les jeunes peuvent-ils peser sur les décisions qui les concernent, notamment en matière de droits et santé sexuels et reproductifs ? C’est à cette question qu’ont répondu trois associations du Sénégal, Mali et Burkina Faso, lors d’un webinaire organisé par les associations JED et Equipop dans le cadre du projet Sansas. 

Autour de la table :

Jane Medor Nanga, Chargée de programme et de mobilisation des ressources à Jeunesse et Développement (JED – Sénégal), modératrice de l’échange
Aïssatou Ndiaye, présidente de Youth Women for Action (YWA – Sénégal)
Adam Dicko, directrice exécutive de l’Association des jeunes pour la citoyenneté active et la démocratie (AJCAD – Mali)
Harouna Ouédraogo, directeur exécutif de SOS Jeunesse et Défis (SOS JD – Burkina Faso)

Face à près d’une cinquantaine de participant·e·s, dont des partenaires techniques et financiers, des jeunes leaders, des membres d’OSC, des chercheur·eu·sess et des professionnel.le.s de santé, leurs échanges ont mis en lumière des parcours de plaidoyer inspirants, des stratégies collectives, mais aussi des défis communs face aux crises politiques et au retrait de plusieurs bailleurs internationaux.

« Tu fais sans moi, tu le fais contre moi » : la jeunesse sénégalaise en première ligne

Au Sénégal, l’implication des jeunes dans les instances décisionnelles reste trop souvent symbolique. Dans le cadre du projet Sansas, Aïssatou Ndiaye a mené avec YWA, ANJSRPF et JED, un plaidoyer de longue haleine pour changer la donne.

« Pour nous, il n’était pas seulement question d’avoir une représentation effective, mais surtout une représentation de qualité », explique-t-elle.

Grâce à la mise en place d’un cadre consultatif des jeunes, plusieurs organisations ont pu faire entendre leur voix auprès du ministère de la Santé sénégalais. Résultat : cinq sièges réservés aux OSC faîtières de jeunesses dans différents comités de pilotage de la santé reproductive. Une avancée majeure, qui permet aux jeunes de participer à l’élaboration de politiques publiques ambitieuses.

AJCAD, du mouvement citoyen à l’organisation d’influence

Fondée en 2014 à Bamako, en pleine crise politique, AJCAD s’est imposée comme une référence nationale en matière d’engagement citoyen et de droits des jeunes.

« AJCAD n’est pas seulement une ONG, c’est devenu un mouvement dans lequel les jeunes s’identifient », rappelle sa directrice, Adam Dicko.

Avec plus de 20 000 membres volontaires et plus de 200 clubs citoyens implantés à travers le Mali, AJCAD mobilise à la fois sur le terrain et au niveau numérique. Plateformes éducatives, applications citoyennes, groupes WhatsApp : les jeunes s’approprient les outils pour faire entendre leur voix, interpeller les autorités et défendre leurs droits.

« Nous avons choisi de toujours être une force de proposition. Même quand nous dénonçons, nous proposons », souligne Adam Dicko.

Une stratégie qui permet à l’organisation d’être reconnue et écoutée, même dans un contexte marqué par la défiance des autorités à l’égard de la société civile.

SOS JD : l’ancrage communautaire comme levier de transformation

Au Burkina Faso, SOS Jeunesse et Défis mise sur l’ancrage local pour influencer les politiques nationales.

« Notre force, c’est de partir des mécanismes communautaires, en incluant femmes, jeunes et personnes handicapées », explique Harouna Ouédraogo.

L’organisation s’appuie sur des parents modèles, des jeunes leaders et des auditrices qui relaient les plaidoyers dans leurs communautés. Elle a contribué à doubler le budget consacré à la planification familiale et à intégrer les besoins des jeunes dans les plans communaux de développement.

Les “champions” et “championnes” formés par SOS JD (élu·es, journalistes, activistes) deviennent des relais essentiels, capables d’interpeller directement les décideurs.

« Ce sont elles et eux qui portent nos messages dans les arènes politiques et médiatiques, et qui aident à transformer les normes sociales », souligne Harouna Ouédraogo.

Résister dans un contexte de crises multiples

Les trois organisations partagent un même défi : rester résilientes malgré les crises politiques, sécuritaires et financières. Le départ de bailleurs clés comme l’USAID, la fin de l’accord d’Alger au Mali, ou encore la réduction des financements internationaux pèsent lourdement.

Face à cela, les réponses varient :

  • développer des ressources endogènes (AJCAD a mis en place des activités génératrices de revenus pour autofinancer une partie de ses actions),
  • revendiquer la localisation de l’aide (SOS JD insiste pour que les financements aillent directement aux organisations locales),
  • s’appuyer sur les alliances locales et internationales (toutes trois participent à des réseaux et plateformes régionales pour mutualiser leurs forces).


Pour une jeunesse actrice et reconnue

De Dakar à Ouagadougou, de Bamako aux arènes internationales, une conviction traverse leurs témoignages : les jeunes ne veulent plus être consulté·e·s à la marge, mais pleinement impliqué·e·s.

Ce webinaire a rappelé que lorsque les jeunes disposent d’espaces et de ressources, elles et ils deviennent des acteur·ice·s incontournables de la démocratie et de la santé. Ces échanges montrent combien l’intégration des jeunes dans les instances de décision n’est pas seulement un enjeu de représentation, mais un levier de transformation démocratique et sociale.

Le projet Sansas accompagne ces dynamiques, en renforçant les capacités des organisations, en soutenant leurs plaidoyers et en favorisant les synergies régionales.

En capitalisant sur ces expériences, le projet contribue à un objectif clair : faire de la jeunesse une actrice centrale de la gouvernance autour des droits et santé sexuels et reproductifs, au Sénégal comme dans toute l’Afrique de l’Ouest.

Replay de l’échange :

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