En 2025, Equipop a organisé une série de trois Laboratoires d’innovation sociale féministe (Lab) en Côte d’Ivoire, en Guinée et au Bénin. Ils réunissaient des activistes, représentant·e·s d’organisations féministes et de la société civile, engagé·e·s pour l’égalité de genre et les droits en santé sexuelle et reproductive.
Les Labs s’inscrivaient dans le cadre du projet Sang pour Sang Uni·es pour la dignité (SpS), financé par l’AFD et mis en œuvre par Equipop, Fos Feminista, Population Services International Europe (PSI-Europe) et la Global South Coalition for Dignified Menstruation (GSCDM).
Le projet SpS promeut la santé et la dignité menstruelles à travers une approche fondée sur les droits, dans neuf pays de mise en œuvre et deux pays d’apprentissage. L’un de ses objectifs spécifiques est de renforcer les capacités des OSC et des activistes féministes, en leur donnant accès à des ressources adaptées, notamment des données intersectionnelles, pour leur permettre d’influencer les politiques publiques et les programmes, y compris les investissements liés aux services de base et aux infrastructures. Les Labs ont contribué directement à l’atteinte de cet objectif en créant un environnement favorable à la promotion de la santé et de la dignité menstruelles.
Des espaces de co-construction et de réflexivité
Chaque Lab a duré plusieurs jours et s’est articulé autour de méthodologies participatives, d’ateliers d’intelligence collective, de temps de partages d’expériences militantes. Des séances de cartographie des acteur·rices, de diagnostic sensible des systèmes d’oppression ont rythmé les échanges.
Les Lab ont été pensés comme des espaces temporaires de réflexion, de création et d’action. Les participant·e·s y sont invité·e·s à déconstruire collectivement les normes sociales discriminantes, explorer des pratiques de transformation sociale, et proposer des pistes d’action féministe contextualisées.
Les Labs ont permis de créer des espaces uniques de rencontre, de dialogue et de co-construction autour de la justice et de la dignité menstruelles. Dans des contextes différents mais traversés par des défis similaires: tabous persistants, manque de cadre normatif, inégalités d’accès aux produits et services. Ils ont constitué des catalyseurs d’idées et de stratégies collectives pour transformer les réalités.
Trois contextes, une même ambition : faire bouger les lignes et mener la révolution rouge
- En Côte d’Ivoire : Le projet « Sang pour sang ensemble » vise, d’ici 2026, à faire reconnaître la santé et la dignité menstruelles comme un enjeu de santé publique et de droits humains. Pour cela, il agit sur trois leviers : intégrer la dignité menstruelle dans les modules éducatifs de l’éducation à la Santé et à la Vie Saine (ESVS), rendre l’information accessible à toutes, y compris aux personnes en situation de handicap auditif, et produire des données dans les communautés défavorisées pour nourrir le plaidoyer. À travers une campagne digitale, des fora communautaires et des rencontres de plaidoyer allant jusqu’à un dîner avec la Ministre de l’Éducation, le projet entend briser le silence autour des menstruations et en faire une priorité nationale.
- En Guinée : Le projet « À nos règles » ambitionne de faire reconnaître la santé menstruelle en milieu rural comme un enjeu de santé publique. Ses priorités sont de créer des espaces sûrs et inclusifs pour recueillir les vécus des personnes menstruées, mobiliser une base de soutien composée de leaders communautaires et religieux, et améliorer l’accès à une information claire et adaptée. Les activités incluent des cercles de parole, des capsules vidéo de sensibilisation et des rencontres de plaidoyer nommées « À table avec nos dirigeant·e·s », afin de transformer les représentations sociales et influencer les politiques.
- Au Bénin : Le projet « Règle-moi ça » veut institutionnaliser la Santé, Dignité et Justice Menstruelles (SDJM) comme une question de droits humains et de justice sociale. Face à l’absence de cadre stratégique durable et à l’invisibilisation politique des menstruations, le projet mobilise trois leviers : la production de données inclusives pour documenter les réalités vécues des personnes menstruées dans toutes leurs diversités, le changement de narratif à travers des campagnes artistiques et scientifiques, et la mobilisation multi-acteurs pour influencer les politiques publiques. L’objectif est d’obtenir un engagement du Ministère de l’Action Sociale et de la Microfinance pour intégrer la SDJM dans ses programmes et politiques, notamment via la reconduction du Programme National d’Hygiène Menstruelle.
Ces trois Lab ont contribué à nourrir une stratégie collective portée par les partenaires, au croisement des enjeux de dignité menstruelle, de justice reproductive et de décolonisation des savoirs. Ils ont également permis d’identifier des axes de plaidoyer communs, de renforcer les capacités des actrices locales, et d’envisager des échanges Sud-Sud entre initiatives inspirantes.
À travers ces espaces, Equipop affirme son engagement pour des dynamiques féministes ancrées, inclusives et transformatrices, où la parole des premières concernées reste au centre de toute action.