– Faire des règles un sujet de santé, d’éducation et d’égalité !
Chaque jour, 300 millions de femmes dans le monde ont leurs règles. Pourtant, les règles sont souvent entourées de silence et de honte dans les familles et bénéficient de peu d’investissement public. A l’occasion du 28 mai, journée mondiale de l’hygiène menstruelle, rappelons que les règles sont un sujet d’éducation, de droits et de santé !
Mettre fin au tabou et à la stigmatisation
Avoir ses règles est un simple fait biologique qui constitue trop souvent un obstacle à la santé, à la dignité et aux respects des droits des personnes menstruées*. Presque partout, les tabous autour des règles suscitent encore gêne, honte et stigmatisation : des violences sexistes culturelles et sociétales, que seule une approche féministe peut faire disparaître. Les règles surviennent à un moment crucial dans la construction de l’identité et cette représentation négative impacte fortement la manière dont les filles considèrent leur corps et leur statut et l’image que les garçons se construisent du corps des femmes. Par ailleurs, cette représentation négative explique en partie les difficultés des femmes et des filles à avoir accès à des infrastructures de base comme des toilettes, à des produits menstruels de première nécessité ou à des soins adaptés quand surviennent des pathologies associées comme l’endométriose.
Grâce à des chercheur·euse·s, à des activistes, à des journalistes, cet enjeu, longtemps resté invisible, émerge aujourd’hui sur le devant de la scène. L’instauration en 2014 de cette journée internationale de l’hygiène menstruelle, le 28 mai, largement relayée dans le monde entier, en est une illustration.
Se battre pour une justice menstruelle
L’étude que nous avons réalisée en Afrique de l’Ouest et du Centre avec UNFPA WCARO confirme, par exemple, que les fausses croyances, les mythes, les pratiques sociales dangereuses et le silence qui planent sur les menstrues peuvent transformer le moment des règles en période de restriction, de privation ou d’exclusion qui s’inscrivent alors dans le continuum des violences sexistes. Tout cela limite les filles et les femmes dans leurs activités personnelles, domestiques, scolaires et professionnelles tout en fragilisant leur estime et leur confiance en elles. En raison de l’accès difficile à des infrastructures adéquates (eau, toilettes, assainissement) et de la pauvreté, la précarité menstruelle et ses conséquences sur la santé et la mobilité concernent une très grande majorité de femmes et de filles.
En France, nous co-signons de la tribune Précarité menstruelle : des annonces insuffisantes et discriminantes, pour dénoncer l’insuffisance du remboursement annoncé, restreint aux moins de 25 ans et aux protections réutilisables.
La santé menstruelle : un levier pour l’éducation et les droits des adolescent·e·s
La santé menstruelle, et plus largement la puberté, représentent une porte d’entrée pour faciliter l’éducation à la sexualité à l’école et en dehors. Elles sont une opportunité pour les structures socio-sanitaires d’ouvrir leurs services aux adolescent·e·s en les intégrant dans le paquet de services DSSRAJ (Droits et santé sexuels et reproductifs des adolescent·e·s et des jeunes), au même titre que la planification familiale, les infections sexuellement transmissibles et le VIH/ Sida.
Forte de ces constats, Equipop intègre systématiquement la thématique santé menstruelle dans ses actions de promotion et d’amélioration des DSSR (plaidoyer, accompagnement, éducation complète à la sexualité). Elle apporte son appui à la mise en œuvre d’actions qui complètent les approches sanitaires : déstigmatisation et création de normes positives sur les règles, appui à la création et à la diffusion de supports et outils d’information et de mobilisation sensibles aux droits humains et au genre, soutien aux mouvements des jeunes féministes dont les voix s’élèvent pour briser le tabou et les discriminations et injustices qui en résultent.
L’association Gouttes Rouge, partenaire d’Equipop dans le cadre du projets Jeunes Féministes en Afrique de l’Ouest, lutte contre la précarité et “l’illettrisme menstruel”. Nombreuses sont les filles qui ne savent pas ce qu’il leur arrive quand leurs règles surviennent pour la première fois : Gouttes Rouges sensibilise, informe les jeunes et déconstruit les idées reçues. L’association organise avec l’ONG Actuelles, ces 27 et 28 mai, le festival “Menstrues libres”, à Abidjan, et Equipop est heureuse de soutenir financièrement et opérationnellement cette initiative.
“ On se bat pour que les filles et les femmes puissent vivre leur période menstruelle de manière sereine et sans honte. Qu’elles n’aient pas à s’en faire pour les protections hygiéniques, les toilettes propres à l’école, puissent travailler de chez elle si elles ont des douleurs… » – Amandine Yao, fondatrice de Gouttes Rouges.
En Afrique de l’Ouest et ailleurs, toutes les personnes qui ont leurs règles doivent avoir accès à des informations, services et soins appropriés, inclusifs et sensibles – quels que soient leur genre, niveau de ressources et situation géographique. C’est un enjeu de justice menstruelle.
C’est en approchant les besoins en santé menstruelle par les droits des personnes et avec un regard féministe que nous pouvons transformer nos sociétés.
*Dans cet artice, nous utilisons souvent les termes “femme” et “fille”. Or il est important de préciser que toutes les femmes et les filles n’ont pas leurs règles, et que toutes les personnes qui ont leurs règles ne sont pas des femmes.
Pour en savoir plus :
- Étude Droits et santé menstruelle, un enjeu d’égalité en Afrique de l’ouest et du centre, 2021 – réalisée par Equipop en collaboration avec UNFPA WCARO et son résumé
- Guide de santé et hygiène menstruelles, Côte d’Ivoire, 2021 – réalisé avec l’appui technique d’Equipop et de l’UNFPA.