Les 20 et 21 novembre 2025, la Résidence MGA de Ouidah a accueilli un atelier de formation de formateur·ice·s consacré aux approches féministes, dans le cadre du projet « Pour des agendas FéminiSTES Paix et Sécurité Africaines de l’Ouest et du Sahel solidaires pour la paix ». Pendant deux jours, 23 représentant·e·s d’organisations féministes, de réseaux de jeunes et de mouvements engagés se sont rassemblé·e·s pour revisiter leurs pratiques, affiner leurs analyses et élaborer ensemble des stratégies permettant de renforcer la mise en œuvre des agendas Femmes, Paix et Sécurité (FPS) et Jeunesse, Paix et Sécurité (JPS) selon une perspective résolument féministe.
Dans un contexte régional toujours marqué par les crises sécuritaires, les violences sexistes et sexuelles, et la montée des mouvements anti-droits, cet atelier s’inscrit dans la continuité d’un effort régional visant à outiller les activistes notamment les jeunes afin qu’iels puissent peser dans les espaces de décision, visibiliser leurs initiatives et transformer les normes et structures qui perpétuent les inégalités de genre.
Une méthodologie participative et ancrée dans les réalités militantes
Co-facilité par Gorée Institute, Equipop, Filles en Action, l’AJEF et JRA, l’atelier a mobilisé des méthodes participatives fondées sur l’intelligence collective et le partage de savoirs situés.
Dans une ambiance attentive et inclusive, les participant·e·s ont co-construit les règles de fonctionnement, installé un cadre sécurisé d’échanges et posé les bases d’une réflexion collective nourrie par les expériences, les contextes d’intervention et les réalités propres aux organisations féministes au Bénin.
Revisiter les fondements : identités, expériences et cadres institutionnels
La première journée a permis de revenir sur les bases conceptuelles et politiques des agendas FPS et JPS, tout en adoptant un regard critique sur leurs limites et leurs angles morts. À travers des exercices d’analyse identitaire et d’intersectionnalité, les participant·e·s ont exploré la manière dont leurs identités genre, âge, origine, rôle communautaire, statut social influencent leurs expériences du conflit, de l’engagement et de la sécurité.
Ces discussions ont ouvert la voie à un espace rare de partage d’expériences et d’écoute empathique, où les vécus liés aux violences, aux discriminations ou aux obstacles structurels ont été nommés et reconnus. Cette séquence, profondément humaine, a renforcé la sororité et consolidé un sentiment d’appartenance au sein du groupe.
Dans l’après-midi, la construction collective de la « fleur du pouvoir » a permis de questionner les différentes formes de pouvoir mobilisées dans les actions féministes: pouvoir de, pouvoir avec, pouvoir intérieur et de réfléchir à leurs implications dans les dynamiques communautaires et institutionnelles.
La journée s’est conclue par une analyse des cadres juridiques nationaux relatifs aux agendas Paix et Sécurité au Bénin, mettant en lumière les avancées, les défis persistants et les opportunités pour renforcer l’institutionnalisation des approches féministes.
Approches féministes pour transformer l’action et les espaces de pouvoir
La deuxième journée s’est ouverte sur une introduction aux approches féministes, à leurs ancrages historiques et politiques, et aux dynamiques de backlash qui visent à fragiliser les acquis des mouvements de défense des droits en Afrique de l’Ouest. Les participant·e·s ont revisité les concepts fondamentaux sexisme, stéréotypes, empowerment, paix positive et exploré les résistances contemporaines portées par les mouvements anti-droits, de plus en plus actifs dans la région.
À travers un arbre à problèmes, les participant·e·s ont identifié les obstacles spécifiques rencontrés au Bénin dans l’action féministe pour la paix : poids des normes patriarcales, faible représentativité, violences structurelles, manque de ressources, instrumentalisation des discours sécuritaires. Les échanges ont permis d’esquisser des stratégies concrètes pour contrer ces obstacles, renforcer les alliances, visibiliser les initiatives et soutenir l’engagement des jeunes femmes dans les dynamiques de paix.
L’après-midi a été consacrée à des simulations de duplication de séances de formation, étape clé pour préparer les restitutions en cascade prévues au sein des organisations et dans les communautés. Ces mises en situation ont permis d’affiner les postures pédagogiques, de renforcer les compétences de transmission et d’anticiper les défis de terrain.
Un espace pour consolider les alliances et préparer la suite
Au-delà des outils et des contenus théoriques, l’atelier a constitué un espace de solidarité et de renforcement mutuel. Les discussions, les partages d’expériences et les moments d’écoute ont permis de tisser des liens durables entre organisations féministes, collectifs de jeunes et mouvements engagés dans la transformation sociale.
Les organisations présentes Filles en Action, le consortium [Fondation des jeunes amazones pour le développement (FJAD), Havre de Paix, Institut Tonafa], Rescue and Hope, Réseau Paix et Sécurité pour les Femmes de l’Espace CEDEAO/Bénin (REPSFECO), Association Barika, Réseau Ouest-Africain des jeunes Femmes Leader – Bénin (ROAJELF-Bénin), Yonba, Jeunes Médiateurs du Bénin (JMB), Jeunesse Regard et Actions (JRA), Association des Jeunes des Espaces Frontaliers du Bénin (AJEF-Bénin) et West Africa Network for Peacebuilding (WANEP-Bénin) ont exprimé leur engagement à poursuivre ce travail, à diffuser les approches féministes dans leurs communautés et à continuer de défendre des espaces de paix, de justice et d’égalité.
Avec l’appui du consortium EQUIPOP–DIAKONIA–FAD–GORIN, les partenaires ont réaffirmé leur volonté d’inscrire leurs actions dans une perspective féministe, intersectionnelle et contextualisée. Deux jours durant, un jalon important a été posé : celui d’un renforcement collectif au service d’une transformation durable, portée par des voix déterminées à faire évoluer les pratiques, les cadres institutionnels et les dynamiques locales vers davantage d’égalité et de paix.
