8 mars – pour un leadership féministe
Aujourd’hui, 8 mars, c’est la journée internationale des droits des femmes, dont le thème est cette année : « Leadership féminin : Pour un futur égalitaire dans le monde de la Covid-19 ». Alors qu’en 2021 sera organisé le Forum Génération Égalité, pour relancer l’agenda en faveur des droits des femmes au niveau mondial, les Nations unies ont souhaité célébrer « les efforts considérables déployés par les femmes et les filles partout dans le monde pour façonner un futur et une relance plus égalitaires suite à la pandémie de Covid-19 ».
Droits des femmes et Covid
La crise sanitaire a eu quelques effets paradoxaux, en particulier ceux de faire disparaitre les femmes des espaces médiatiques et des espaces de décision alors qu’elles étaient encore plus actives qu’à l’accoutumée dans les familles, les quartiers, les commerces ou encore les établissements socio-sanitaires. Faut-il rappeler que, selon l’Organisation mondiale de la santé, “à l’échelle mondiale, 70 % des personnels de santé et des travailleurs sociaux sont des femmes” ? C’est cette situation vécue par les « premières de Corvées » qui est dénoncée aujourd’hui à travers la grève féministe.
Cette situation n’est pas spécifique à un territoire donné ; elle a été observée partout dans le monde, et notamment en Afrique de l’Ouest francophone, région du monde où Equipop a noué des partenariats solides ces vingt dernières années. Durant cette crise sanitaire, les associations africaines de droits des femmes ont établi des constats tirés du vécu des femmes pour lesquelles elles luttent, mais aussi de l’analyse du contexte socioculturel et du cadre institutionnel dans lequel elles évoluent. Elles ont, sur cette base, émis des demandes en direction des pouvoirs publics et des bailleurs. Ce rapport présente ces demandes, qui doivent permettre tout à la fois de répondre de manière plus adaptée aux prochaines crises et de sortir de celle-ci en limitant l’accroissement, déjà observable, des inégalités.
Leadership féminin, mobilisation collective
L’intitulé 2021 de la journée des droits des femmes pourrait induire en erreur. Le leadership n’est par essence ni féminin, ni masculin. Les femmes comme les hommes peuvent faire preuve de leadership, les barrières étant pour les femmes souvent plus nombreuses et socialement construites. Les témoignages des féministes du Sénégal et de Côte d’Ivoire que nous avons recueillis en partenariat avec des étudiantes de Sciences Po illustrent bien ces difficultés, de même que le reportage réalisé par RFI avec le soutien d’Equipop au Burkina-Faso.
Ce que disent aussi ces témoignages, et qui est réaffirmé au quotidien dans notre travail avec les activistes et associations qui font avancer les droits des femmes, c’est que leadership individuel et leadership collectif sont intimement liés, le « pouvoir avec » étant une dimension cruciale de l’émancipation individuelle comme des changements politiques et sociaux. Il serait, en ce sens, sans doute plus pertinent de parler de leadership féministe.
« Plus les féministes sont nombreuses, plus elles sont fortes. Toutes les femmes et les filles doivent savoir que l’injustice ne sera pas un obstacle à leur succès, si elles sont solidaires, qu’elles rêvent grand et qu’elles travaillent dur. » Aminata Badiane Thioye, Sénégal
C’est cette dimension collective que les jeunes du réseau des jeunes féministes d’Afrique de l’Ouest et d’Equipop ont voulu appuyer à travers ce guide d’activisme féministe. En amont du Forum Génération Égalité, il s’agit d’encourager les jeunes à se mobiliser pour des sociétés justes.
A quand des politiques publiques féministes ?
Le Forum Génération Egalité sera cette année une opportunité cruciale pour relancer les agendas politiques en faveur des droits des femmes. Pour accélérer les avancées vers des sociétés égalitaires, l’engagement des Etats dans de réelles approches féministes constitue une voie à explorer, et ce malgré tous les écueils que nous pouvons anticiper, à commencer par l’instrumentalisation de ces approches et leur « dé-radicalisation ». Plusieurs Etats, dont la France, se sont positionnés comme souhaitant participer à ce « leadership féministe ». Il reste maintenant à voir si cette volonté affichée sera accompagnée d’une vision de long terme, de moyens conséquents et d’une approche cohérente entre diplomatie féministe et mesures nationales. C’est ce plaidoyer que nous menons aux côtés de nombreuses actrices, à travers notamment le collectif Générations féministes.
Vingt-six ans après la quatrième conférence mondiale de Pékin, les droits humains ne sont toujours pas garantis pour les femmes et les filles. L’émergence d’un monde égalitaire suppose la mise en commun des énergies progressistes comme la pris en compte de la pluralité des expériences vécues. Dans un tel mouvement transnational, aiguillés par les mouvements sociaux, l’ensemble des acteurs et actrices, y compris les Etats, doivent prendre leur part. Equipop prendra la sienne.