– Insuffler une perspective féministe à la conférence Francophone sur le VIH : retour sur l’AFRAVIH
La Conférence AFRAVIH est un espace de dialogue essentiel sur le VIH en Afrique francophone. Lors de la 12ème édition à Yaoundé, Equipop a plaidé pour insuffler une perspective féministe indispensable à la lutte contre le VIH et la défense des droits sexuels et reproductifs (DSSR). Nos interventions ont mis en lumière le lien entre l’égalité des genres et une riposte efficace, ainsi que l’importance d’impliquer les femmes, les jeunes et les minorités de genre pour l’effectivité des droits.
I. La Conférence AFRAVIH, plateforme de dialogue sur le VIH en Afrique francophone
Du 15 au 19 avril 2023 s’est tenue à Yaoundé la 12ème Conférence Francophone sur le VIH/sida (AFRAVIH). Créée en 2009, cette conférence rassemble biennalement les acteur.rice.s engagé.e.s dans la lutte contre le VIH, les hépatites et autres infections et plus récemment la santé sexuelle et reproductive, dans les pays francophones.
L’ambition de l’AFRAVIH est de favoriser le partage d’expériences et les discussions entre professionnel.le.s de santé, organisation de la société civile, communautés directement concernées et scientifiques autour des avancées biomédicales, mais aussi des enjeux sociaux et des droits humains liés au VIH. Car malgré les progrès thérapeutiques, le VIH, les hépatites et autres infections restent des défis sanitaires majeurs, notamment pour les populations les plus vulnérables et marginalisées.
II. Les approches féministes, levier de lutte pour les DSSR/VIH
A l’AFRAVIH, Equipop a pu mettre en lumière le lien étroit entre l’égalité des genres et une lutte efficace contre le VIH et pour le respect des droits sexuels et reproductifs. Les rapports de domination patriarcaux rendent en effet les femmes, les jeunes et les minorités de genre particulièrement vulnérables face aux risques en matière de santé.
Malgré ces réalités, les femmes et les jeunes restent trop souvent invisibilisées dans les programmes de défense des droits et santé sexuels et reproductifs (y compris lutte contre le VIH). Une approche globale, féministe, est nécessaire pour répondre aux besoins spécifiques des femmes, des jeunes et des minorités de genre. Cela implique de les associer pleinement à l’élaboration des politiques de santé, en s’attaquant aux racines des inégalités qu’elles subissent.
III. L’empouvoirement des jeunesses, moteur de changement pour l’effectivité des droits
Equipop a également mis en avant l’importance de l’empouvoirement des jeunes, notamment à travers la présentation de deux projets phares : Sansas et Jeunes en Vigie. Un symposium spécifique co-organisé avec Solthis, et porté par l’ensemble du consortium d’organisations à l’origine du projet Sansas (RAES, Lartes, Enda, Equipop et Solthis) accompagné par l’AFD et le réseauEVA, a permis de détailler en quoi cette initiative constitue une réponse globale, holistique et innovante aux besoins des adolescent.e.s et jeunes Sénégalais.es en matière de droits et de santé sexuels et reproductifs (DSSR). Equipop a rappelé que le travail mené vise à outiller les adolescent.es et les jeunes sur les enjeux de droits et santé sexuels et reproductifs, les former au leadership et aux techniques de plaidoyer. Ils et elles peuvent ainsi devenir acteurs et actrices de leur propre santé, en animant des activités de sensibilisation dans leur communauté et en interpellant les autorités pour faire évoluer les politiques publiques. Equipop a insisté sur les 3 principes d’action au cœur de sa démarche d’empouvoirement des jeunes : développer en profondeur leurs savoirs et leurs compétences sur les DSSR, leur permettre de passer véritablement à l’action de façon responsabilisée, et enfin amplifier leurs voix individuelles pour en faire une force de changement collectif au sein des espaces de débat et de décisions les concernant. Ce processus transformateur vise à les faire passer d’un sentiment de pouvoir individuel fragile à un réel pouvoir d’agir et d’influencer ensemble pour promouvoir leurs droits fondamentaux.
Un poster présentant la démarche de « démocratie en santé féministe » déployée dans le cadre du projet Jeunes en Vigie a également permis à Equipop de mettre en lumière les principes fondateurs de son approche : empouvoirement individuel et collectif des bénéficiaires, mobilisation sociale et politique citoyenne structurée, vigie et plaidoyer participatif pour une redevabilité accrue des autorités sanitaires. Les résultats partagés ont souligné que le soutien à une réelle démocratie en santé, ancrée dans les principes féministes, offrait des solutions transformatrices et apparaissait comme un processus dynamique et vertueux pour garantir l’effectivité du droit à la santé pour toutes et tous en matière de santé sexuelle et reproductive et de lutte contre le VIH/Sida. Placer ainsi la jeunesse au cœur des processus de mobilisation citoyenne, de participation aux décisions sur leurs besoins spécifiques, et de contrôle de la redevabilité des institutions, constitue un levier indispensable.
IV. Une gouvernance mondiale féministe de la santé à promouvoir
Les espaces de dialogue comme l’AFRAVIH ainsi que les organisations internationales qui portent les enjeux DSSR/VIH restent marqués par des approches biomédicales de la santé et des cultures institutionnelles profondément patriarcales. Les enjeux de genre y sont marginalisés, dilués dans un jargon technique, et les approches féministes peinent à être visibilisées dans l’analyse et donc à se concrétiser dans le passage à l’action.
Pourtant, comme l’a rappelé Equipop dans un précédent communiqué, les solutions portées depuis des années par les associations féministes permettraient d’agir sur les causes profondes des vulnérabilités sanitaires des femmes. Il est urgent de les impliquer dans ces espaces d’échanges pluridisciplinaires et au sein de la gouvernance mondiale de la santé pour insuffler ce tournant féministe indispensable à une lutte pérenne contre les pandémies et pour les droits sexuels et reproductifs.