– Ma Réalité : améliorer l’accès des jeunes à des informations et services de qualité sur la santé sexuelle et reproductive
Quand on est adolescent·e en Côte d’Ivoire, et on voudrait obtenir des informations fiables à propos de notre corps, de notre sexualité et la santé reproductive. Mais vers qui doit-on se tourner ?
C’est pour répondre à cette question et mieux comprendre les réalités vécues par les jeunes ivoirien·ne·s que le projet Ma Réalité a vu le jour.
L’urgence d’agir pour éviter des comportements à risque
Nous savons d’ores et déjà que les jeunes n’ont pas toujours accès aux informations ou aux services de santé sexuelle et reproductive qu’il faut. Quelques statistiques permettent d’illustrer ce constat :
- Les adolescent·e·s et jeunes de 10 à 24 ans représentaient plus d’un tiers de la population ivoirienne ;
- 30% des jeunes âgé·e·s de 15-24 ans étaient sexuellement actifs·ves ;
- Seulement 7% des adolescentes ou des jeunes femmes mariées ou en union libre âgées de 15-19 ans utilisaient une méthode moderne de contraception, et seulement 11,5% chez les 20-24 ans.
Mieux comprendre la réalité des jeunes …
Quels seraient les obstacles qui empêcheraient les adolescent·e·s d’utiliser les centres de santé pour accéder aux informations ou services, ou de se référer à leurs parents, à des agent·e·s de santé de leurs établissements scolaires sur les questions de SSR ?
Pour y voir plus clair, le projet a développé une méthodologie de sondage à la fois qualitative et quantitative, à travers la collecte de plus de 50 témoignages accueillis lors des entretiens avec des jeunes à Abidjan, ainsi qu’un audit social de satisfaction réalisé par des jeunes évaluateur·ices auprès d’environ 450 utilisateur·ices adolescent·e·s des centres de santé dans le district d’Abijdan.
Ces données ont tout d’abord montré un constant de difficultés dans l’accueil des jeunes par les agent·e·s de santé, traduit souvent par un sentiment d’humiliation, de honte ou de rejet, surtout pour les adolescentes.
Comme j’étais déjà sexuellement active, je me suis rapprochée, avec beaucoup d’hésitation, de la sage-femme pour avoir des conseils. Mais elle m’a répondu à haute voix, devant tout le monde : « Toi aussi tu es dedans ? ». Humiliée, je suis sortie de la salle (….) J’aurais aimé que ces agent·e·s de santé tiennent compte de mes droits à l’accès en SSR/PF en me donnant les informations dont j’avais besoin à ce moment-là pour me permettre de mieux m’orienter.
Ensuite, un manque de communication « franche et bienveillante » sur ces sujets si souvent tabou, surtout en famille ou à l’école, souvent avec des conséquences très nocives pour les jeunes et leur avenir.
Je ne saurais vous dire combien de fois j’ai avorté au juste, jusqu’à ce qu’un jour, après l’un de ces avortements, j’ai beaucoup saigné. Le médecin m’a dit que les avortements que je faisais avaient gâté beaucoup de choses dans mon ventre et que suite à cela je ne pourrais plus jamais avoir d’enfants. Je n’avais que 20 ans quand j’ai reçu cette mauvaise nouvelle. J’aurais pu éviter cela si j’avais reçu plus tôt une éducation complète à la sexualité.
Enfin, beaucoup des témoignages faisaient remonter des violences ou agressions sexuelles vécues par les jeunes, surtout les jeunes filles, qui ne savaient pas comment gérer ces situations ni vers qui tourner pour arrêter leurs agresseurs
…. Pour mieux construire les réponses des parents, des agent·e·s de la santé, et du gouvernement
Des témoignages collectés, le projet Ma Réalité en a sélectionné onze comme sujet d’un « mur d’affiches » : des textes illustrés et transformés en poster géant, exposés lors des évènements OSC sur les SSR en Côte d’Ivoire, et partagés en version pdf sur les réseaux sociaux.
Également dans un but de partager et reconnaître ces réalités, d’autres témoignages ont été développés en cinq court-métrage, destinés à interpeller les communautés et les décideur·e·s politiques sur la nécessité de faire changer les choses.
A partir de ces produits visuels et audio, le projet Ma Réalité a construit une plateforme de plaidoyer. Car comme beaucoup d’autres pays, la Côte d’Ivoire a pris des engagements internationaux ou nationaux pour améliorer les taux d’accès à la contraception ou pour faire baisser la morbidité et la mortalité de santé sexuelle et reproductive. Pour rappeler ces engagements et l’urgence d’agir, le projet a évalué les progrès de ces engagements, et lancé une pétition interpellant les décideur·e·s politiques de tenir leurs promesses et d’entendre les réalités des jeunes Ivoirien·ne·s.
Faire agir le gouvernement, à travers l’empouvoirement des jeunes !
Ce projet, mené par l’AFJCI, l’APASU et la MESSI, a été conçu dans un but d’empouvoirer les jeunes eux·elles-mêmes. Ainsi, ce sont les jeunes qui racontent leurs expériences, et qui ont été formé·e·s dans l’utilisation de l’outil dit « score-card » pour évaluer les services et informations reçues par les adolescent·e·s dans leurs centre de santé.
Des jeunes qui sont informé·e·s de leurs droits, qui peuvent s’exprimer sur leurs réalités, qui peuvent évaluer l’accueil et les informations qu’ils·elles ont reçus, et qui peuvent voir l’impact de leur participation sur le projet et l’attention portée par le gouvernement et les prestataires de santé à leur regard : cet objectif est au cœur du projet Ma Réalité, comme finalité en soit, et étape essentielle pour faire changer la donne de la santé adolescente sexuelle et reproductive en Côte d’Ivoire.