L’Agora : ensemble pour créer, se mobiliser et résister
Après les confinements successifs entraînés par la crise du COVID-19, les mouvements féministes ouest africains ont eu plus que jamais besoin d’être de nouveau ensemble, de se rencontrer, de se retrouver.
Depuis 2018 Equipop appuie les dynamiques collectives régionales existantes en Afrique de l’Ouest francophone en facilitant des espaces d’échange en ligne et en présentiel entre féministes d’Afrique de l’Ouest francophones, autour d’événements ou de thématiques particulières.
Afin d’appuyer les dynamiques collectives et se tenir aux côtés des mouvements féministes en Afrique de l’ouest, Equipop souhaite mettre à disposition des militantes des ressources et espaces (physiques et en ligne) pour leur permettre d’échanger et de construire et renforcer des alliances avec des activistes féministes présentes dans d’autres zones francophones. C’est ainsi que naît l’Agora Féministe, un espace d’échanges et de travail collectifs, qui a réuni pendant 5 jours, 50 militantes féministes d’Afrique de l’Ouest et Centrale au Niger, afin de poser les bases d’une collaboration entre militantes féministes d’Afrique de l’ouest pour une action collective ciblée.
L’Agora Féministe est un espace d’échanges et de coconstructions facilité par Equipop en collaboration avec le ROAJELF Bénin, IPBF (Burkina), Femin-in (Burkina), la Ligue Ivoirienne, le Club des Jeunes Filles Leaders de Guinée, GMC (Mali), Voix de Femmes (Mauritanie), la Cellule Nigérienne des Jeunes Filles Leaders, ROAJELF Sénégal, YWA (Sénégal) et le Réseau des Jeunes Féministes d’Afrique de l’Ouest.
Passer du temps ensemble pour se batir un futur féministe commun
Se rassembler et surtout échanger sur leurs expériences et expertises, a permis non seulement aux unes et aux autres de créer des liens forts, mais aussi de se fixer un objectif commun en Afrique de l’Ouest Francophone. Cette semaine a été l’occasion de rassembler des militantes féministes de 8 pays d’Afrique de l’Ouest Francophone, issues d’organisations et de cultures différentes, pour échanger pendant 5 jours sur ce qui les rassemble, leurs défis communs.
Tout au long de la semaine, les participantes qui le souhaitaient ont pu partager et former leurs consoeurs sur des thématiques variées, allant de l’accompagnement des survivantes de violences basées sur le genre, à la prise de vue, en passant par des réflexions sur le droit à disposer librement de son corps, participant ainsi à l’empouvoirement collectif de toutes les militantes présentes.
Au delà du partage des expertises de chacune, l’Agora a été un espace féministe francophone qui a porté des valeurs de bienveillance et de sororité. Chaque jour, des cercles de paroles étaient le lieu pour les participantes de se questionner et partager leurs pensées sur des thématiques liées à leur militantisme. D’autres moments dédiés à la convivialité et au partage des émotions de chacune ont permis d’aborder certaines questions difficiles, comme celles de la santé mentale et du bien être, et de voir s’exprimer une solidarité politique entre participantes.
Enfin, le rassemblement de toutes ces expertes féministes a été l’occasion pour elles de faire le lien avec leurs ainées, notamment en refaisant appel à la Charte africaine des principes féministes pour orienter certaines discussions, mais aussi en invitant des devancières féministes dans les échanges comme Madame Zeinabou Hadari.
De ce moment collectif sont également sorties des préoccupations communes et défis à relever pour les féministes
La sécurité des militantes féministes
Un des points majeur sur lequel les féministes ont décidé d’alerter et de sensibiliser le collectif est la question de la sécurité des militantes. Si les modes de militantisme ont évolué et ont permis une plus grande inclusion de militantes féministes dans la région, celles-ci s’exposent parallèlement à de multiples menaces. Cet élément est un point sensible qui doit être adressé non seulement par elles, mais aussi par les organisations féministes et de défense des droits de femmes telle que Equipop. Il ne s’agit plus seulement de protéger les militantes dans l’espace civique, il faut également trouver des solutions face aux violences auxquelles elles s’exposent sur l’espace numérique.
Harcèlement en ligne, revenge porn, deep fake, autant de violences auxquelles elles doivent savoir répondre et contourner. Quelles stratégies pour éviter d’être exposé.e au détriment de sa santé mentale ? Quelles informations divulguer ou non dans l’espace numérique ? Quand faut-il lâcher prise? Des outils pratiques, partages d’expérience et autres conseils ont été échangés entre elles. Les militantes souhaitent par la suite investir ce sujet et y accorder plus de place au sein de leurs espaces collectifs.
La montée des mouvements anti-droits
En plus du contexte sanitaire de la COVID 19 ayant fragilisé les mouvements féministes, l’instabilité du contexte politique de la région a renforcé l’émergence de mouvements anti-droits. On observe ainsi une montée de ces mouvements qui attaquent violemment les acquis et les voix des mouvements féministes.
Les paroles des féministes deviennent inaudibles et c’est la raison pour laquelle il est important d’avoir des espaces sécurisés et bienveillants où elles peuvent mener des réflexions autour de stratégie et de résistance féministes.