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– RÉÉCRIRE LE RÉCIT DES MENSTRUATIONS : DU STIGMATE À LA DIGNITÉ MENSTRUELLE

Le 28 mai est la Journée mondiale de l’hygiène menstruelle. Une occasion importante… mais il est temps d’aller plus loin. Parler d’”hygiène”, c’est rester coincé·es dans une approche sanitaire, biomédicale, souvent culpabilisante. Ce que nous portons à travers le projet Sang pour Sang : Uni·e·s pour la dignité*, dans neuf pays en Afrique, en Asie et dans les Caraïbes, c’est un changement de narratif : remettre la dignité et les droits humains au cœur des politiques menstruelles.

L’enjeu est clair : permettre à toutes les personnes menstruées de vivre leurs règles sans honte, sans violence, avec l’information, les produits, les services et les espaces nécessaires pour exercer pleinement leurs droits. Replaçons les menstruations autour de la dignité !

RÈGLES SOUS CONTRÔLE : COMMENT L’HYGIÉNISME PERPÉTUE LA DOMINATION

Le terme “hygiène menstruelle”, largement utilisé dans les politiques publiques, les campagnes de sensibilisation ou encore les programmes éducatifs, s’est imposé comme cadre dominant pour parler des menstruations. Que dit-il du contrôle que le patriarcat exerce sur les corps, les désirs et l’existence des femmes et des personnes minorisées ? Comment façonne-t-il nos représentations des règles ? Et surtout, comment en sortir pour renverser ces logiques de domination et sortir d’un cadre qui perpétue le tabou et la stigmatisation des menstruations ?

 

Le cadrage des menstruations, hérité d’une approche biomédicale, réduit les règles à une question de “propreté” et un problème sanitaire à gérer, occultant leur portée sociale, culturelle et politique. Il a nourri une socialisation marquée par la honte et le dégoût du corps, en particulier chez les adolescentes**. Le lien avec le patriarcat est dans ce cas très clair : ce contrôle, souvent invisible mais profondément enraciné, se manifeste à travers des normes, des lois, des silences et des violences qui dictent ce que les corps peuvent faire, ressentir ou revendiquer, sans remettre en cause les rapports de pouvoir qui perpétuent la stigmatisation.

 

Dans toutes les géographies, le mot « impureté », dans ses traductions et nuances culturelles, revient avec force lorsqu’il est question de règles. Cette idée traverse les contextes, le langage, les symboles, les comportements attendus révèlent une constante : les menstruations sont marginalisées, et les personnes qui les vivent sont souvent réduites au silence ou à l’invisibilité.

ENTRE SILENCES, TABOUS ET DISCRIMINATIONS

Un chiffre : 93 % des personnes menstruées dans les pays portés par le projet ont déclaré avoir subi au moins une forme de discrimination liée à leurs règles. Ce chiffre est un cri d’alarme, un fort signal de l’intensité et de la portée de la stigmatisation à laquelle sont soumises les personnes menstruées. Il révèle l’ampleur de la stigmatisation et le manque criant de contrôle qu’ont ces personnes sur leur propre corps et leur santé.

 

Dans certains pays, les restrictions vont jusqu’à interdire de cuisiner, toucher des objets ou fréquenter certains espaces. Le manque de produits menstruels sûrs et d’infrastructures adaptées renforce cette exclusion et les prive du contrôle sur leur propre bien-être. Les menstruations sont, dans beaucoup de contextes, comme sales ou honteuses. Une honte internalisée, mais aussi imposée. Ce qui est naturel devient tabou, jugé indésirable, voire interdit. C’est ainsi qu’une réalité biologique et naturelle devient une source de discrimination systémique. Des activités comme aller à l’école, participer à des événements sociaux ou même interagir avec des hommes deviennent des actes interdits. Les normes sociales et religieuses restrictives amplifient encore cette réalité.

 

Tant que les réponses institutionnelles resteront centrées sur les seuls produits, sans s’attaquer aux racines de la stigmatisation, rien ne changera en profondeur. Oui, l’accès aux produits menstruels est nécessaire, mais à lui seul, il ne suffit pas à effacer la stigmatisation qui entoure les menstruations. Ce manque d’adaptation des politiques publiques et des programmes à la réalité vécue des personnes menstruées exacerbe encore les inégalités.

 

Et derrière ces chiffres et récits il y a des vies marquées par l’isolement, la honte et l’exclusion. Il est temps de parler dignité. Et pour ça, tout commence par les mots. On en parle ?

SORTIR DE LA HONTE POUR ENTRER DANS LA DIGNITÉ

Rétablir la perspective des droits humains et de la dignité dans le traitement des menstruations se présente comme l’alternative clé. Parler de “dignité”, c’est reconnaître aux personnes menstruées le droit à l’information, à la sécurité, à la santé, à la parole et au respect de leur corps. C’est dire haut et fort que les menstruations ne sont pas un problème à gérer, mais une réalité humaine à accueillir, à comprendre et à intégrer dans les politiques publiques, les normes sociales et les espaces de vie, quels qu’ils soient. 

 

Et ce mot, “dignité”, on ne l’emploie pas à la légère. Nous envisageons la dignité menstruelle comme un état dans lequel toutes les personnes peuvent avoir leurs menstruations sans honte, sans peur, sans jugement, sans douleur, sans inconfort, sans isolement, sans exclusion, sans discrimination et sans violence ; où elles disposent des informations, des moyens, des services et d’un soutien adaptés pour mener leur vie sans perturbation ni difficulté, qu’elles aient ou non leurs menstruations ; où elles ont la maîtrise de leur corps ; et où ces conditions sont respectées pour ce qu’elles sont, c’est-à-dire des droits humains.Ce cadre exigeant doit guider l’action publique et militante pour la justice menstruelle.

 

Car les mots ne sont jamais neutres : ils reflètent et renforcent des systèmes de domination. Le lexique dominant (“hygiène menstruelle”, “produit d’hygiène”, “serviette hygiènique”) perpétue une vision des règles comme une gêne, un secret. À l’inverse, parler de dignité menstruelle, c’est déplacer le curseur, bouger les lignes. C’est politiser une expérience intime trop souvent réduite à une question de propreté. C’est reconnaître des besoins légitimes et y répondre sans jugement.

 

Changer de vocabulaire, c’est changer de regard. On ne dit plus “produits d’hygiène” mais “produits menstruels”. Plus “serviette hygiénique”, mais “serviette menstruelle”. Plus “gestion de l’hygiène”, mais “prise en compte des besoins menstruels dans la dignité”. Cet ajustement sémantique n’est pas anodin : c’est un changement de paradigme, un pas de plus vers une société qui respecte les personnes qui menstruent.

On ne dirait pas produits d’hygiène menstruelle mais produits menstruels !

Serviette hygiénique ? Disons plutôt serviette menstruelle.

L’hygiène menstruelle… On parle de santé et de dignité menstruelle !

La santé menstruelle, oui, mais la santé et dignité menstruelle c’est mieux.

La gestion de l’hygiène menstruelle, non, on parlerait plutôt de la prise en compte des besoins menstruels dans la dignité.

* Le projet Sang pour Sang : Uni·e·s pour la Dignité est mis en œuvre en consortium par Equipop, Fòs Feminista, Global South Coalition for Dignified Menstruation et PSI-Europe. Il est financé par l’AFD, via un FSOF (Fonds de soutien aux organisations féministes).

 

** Blood Magic The Anthropology of Menstruation · by Thomas Buckley, Alma Gottlieb · June 1988 · First Edition · Paperback

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