Ousmane Ouédraogo, un partisan de la délégation des tâches au Burkina Faso

 

Ousmane Ouédraogo, est le chef de file adjoint du groupe technique sur la santé de la reproduction et un interlocuteur clé pour Equipop dans la mise en place de la délégation des taches.

 

 

1-En tant que chef de file adjoint du groupe technique sur la santé de la reproduction, quelle lecture faites-vous de la situation de la planification familiale (PF) au Burkina Faso ?

 

La situation de la PF est critique au Burkina. Nous éprouvons d’énormes difficultés à faire bouger les choses en matière de prévalence contraceptive. Les politiques de PF ne parviennent pas à réellement renforcer l’accès aux services ni à augmenter la demande pour satisfaire les besoins des populations rurales, des zones péri-urbaines et surtout des adolescent-e-s et des jeunes. Selon le récent PMA (Performance Monitoring  and  Accountability), les besoins non satisfaits augmentent, 24% des femmes évoquent des problèmes d’accès aux services de PF pour des questions de coût, de distance et de gaps en matière de personnel qualifié.
De manière globale, la situation nécessite une politique de relance basée sur des stratégies révolutionnaires, parmi lesquelles la délégation de tâches, qui puissent booster les indicateurs.

 

2-Quelles sont les politiques, les stratégies et les actions entreprises par l’Etat pour améliorer  le taux de prévalence contraceptive ?

 

L’Etat fait quelques efforts et a inscrit une ligne budgétaire pour supporter les produits contraceptifs. Cependant, les prestataires éprouvent des difficultés à l’appliquer de manière harmonisée surtout à cause des consommables qui ne sont pas pris en compte dans la réduction de 50% du coût des contraceptifs. L’expérimentation de sayana press, nouvelle gamme de produit contraceptif à usage unique en phase pilote au Burkina Faso depuis juillet 2014, a eu des effets positifs dans les régions à fort potentiel mais le défi est de ramener cette méthode au niveau communautaire. La surveillance hebdomadaire des produits a été présentée comme une bonne pratique contribuant à améliorer la sécurité contraceptive. Mais malgré ces initiatives, les effets globaux des stratégies sont très peu perceptibles et les indicateurs stagnent.

 

3-En Novembre 2014, le ministère de la Santé a signé un accord de collaboration avec Equipop autorisant l’expérimentation de la délégation des tâches au Burkina. En quoi va consister la délégation des tâches ? Pensez-vous qu’elle pourrait constituer une stratégie porteuse pour la PF?

 

Il s’agira de permettre aux agents de santé (infirmier-e-s, accoucheuses) dans les sites pilotes d’offrir les méthodes de longue durée, la première prescription de pilule et l’injectable. Dans notre contexte, je ne vois pas une approche plus performante que la délégation. Opter pour cette stratégie réduirait les coûts de revient que les clientes supportent pour accéder aux méthodes dans des zones reculées. L’implication des communautés assurera la disponibilité permanente des services et facilitera leur accès dans un contexte de pauvreté et d’énormes entraves socio-culturelles.
L’adhésion timide à la délégation des tâches est une action salutaire mais à mon avis on devrait plutôt développer une réelle politique de passage à l’échelle de cette approche par l’adhésion des partenaires techniques et financiers.